Le truc le plus frappant, finalement, dans l'album d'Issakidis, c'est son étrange aspect curatif: son jusqu'au boutisme formel (morceaux à rallonges, vrombissements monotones persistants jusqu'à l'ivresse) évoque moins un geste expérimental qu'un voyage, une expérience littéralement sensorielle. C'est bête à dire après les embarrassantes expériences sonores de la musique new-age, mais Karezza est un vrai disque à "méditer". Largement conçu en temps réel, dans un "état alterné de conscience", il s'inscrit dans une démarche intime de son auteur qui déborde largement des limites du phénomène sonore et de la musique. C'est ce qu'on vérifie dans le clip du morceau-titre "Karezza", tourné par ses soins dans son Vancouver natal: un clip-trip qui nous fait sérieusement nous poser des questions quant à la complaisance de notre usage presque quotidien du mot "psychédélique".
Suivant l'enseignement de ses gourous de Kundalini, issu du yoga tantrique et conduisant à l'eveil spirituel, George, après s'être langoureusement lavé le corp, abandonne peu à peu le centre de la ville pour une pérégrination dans la forêt avec son mec. Ils y boivent l'Ayahuasca des chamanes au milieu des arbres, rentrent en transe, puis recherche l'harmonie. Comme le disait le poète russe Maïakovski de manière un peu grandiloquente à propos du cinéma: chez Issikadis la musique est, plus qu'un champ d'expression artistique, "presque une conception du monde". Maintenant qu'on a vu le film, on comprend en tout cas un peu mieux la b.o.
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