Si on devait élire le Président d'Internet, on choisirait peut-être Luke Wyatt. Le mec a tout : l'ironie aiguisée mais mélancolique, le blaze rigolo mais suffisamment mystérieux pour qu'on oublie vite la blague après l'avoir comprise, une connaissance sans faille des mécanismes de mise en abyme de la connaissance pour briller dans les arènes impitoyables de l'infra Internet, et une gueule d'ange qu'il n'hésite pas à déformer selon les audiences et le degré de célérité intellectuelle de ses interlocuteurs. Surtout, il a fait ses preuves comme inventeur d'images influent sur YouTube et Vimeo grâce à son usage brillant du datamoshing ce qui lui vaut le respect de la plupart des leaders d'opinion ventripotents qui occupent leur vendredi soir en trollant âcrement les nuées purulentes de commentaires sous les articles de Vice et Noisey.
Fans hardcore de son album Let's Cry And Do Pushups At The Same Time, on s'emballe donc doublement pour la sortie prochaine de son nouveau Feeling is Law, qui annonce en sus une inspiration au premier degré du côté de la peinture romantique allemande du 19ème siècle et une évolution majeure de son son : finis les sons de synthé dégeulassés méchamment dans un magnéto cassette en bout de course, bye bye les sons de guitare de Mark Knopfler au troisième degré, bonjour marimba tournoyants, beau bois, clusters orchestraux enlevés.
Moins évidemment grimaçant dans ses emprunts et moins distancié dans ses intentions, le premier extrait plein d'air et d'émotions qu'on peut écouter ci-dessous n'évoque en tout cas au départ que des émotions musicales très franches et des sensations très pures : le Penguin Café Orchestra, le Jim O'Rourke d'Eureka, le Steve Reich de City Life... Subrepticement, pourtant, quelque part autour de 2.30, l'esprit de l'auditeur se retrouve pourtant dans des territoires virtuels vintage sortis d'un microprocesseur Pentium pro première génération, dont la bande-son serait signée Brian Eno circa 1995 ou James Ferraro. Comment le mec s'y prend pour nous ballader comme ça ? On en a aucune idée et ça nous titille d'autant plus le muscle qui nous fait aimer la musique depuis qu'on est tout petit.
Union and Return sort le 13 mai sur Mexican Summer.
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