Spaceghostpurrp : God of Black vol.1

Rihanna, Jay-Z et Kanye qui font des symboles Illuminati avec les doigts, Clams Casino ou Young L qui samplent Björk, Imogen Heap et Tangerine Dream, T.I. qui se fait serrer pour possession d’ecstasy, le hip-hop des années 2010 s’apparente de plus en plus à une sorte de Triangle des Bermudes pété. Ou une Terre du Milieu pleine de tribus mutantes, chacune avec sa langue, ses traditions et ses codes vestimentaires.

Prenez le gamin Spaceghostpurrp et essayez d’y comprendre quelque chose. Remarqué aux côtés du wonderkid new-yorkais ASAP Rocky sur sa mixtape à 1 millions de dollars, cet underage rapper autoproclamé (il est né en 1991) use des symboles, des crânes et des lettres “U”,”R” et ”X” comme autant d’écrans de fumée. Du coup, ses mixtapes ressemblent d’abord à des sentinelles imprenables, des labyrinthes de références obscures et de codes indéchiffrables.

Mais au-delà du côté “symptôme générationnel post-internet sur pattes” à la Tyler ou à la Lil B, Muney Jordan a le swag visqueux et communicatif.

Egotrippé comme il faut (il a renommé le jour de sa naissance le “Purrp Day”), il est complètement obsédé par Three Six Mafia, le hip-hop de l’année de sa naissance (UGK, DJ Paul, Eazy E) et les beats codéinés de feu DJ Screw, à tel point que ses morceaux chopped & screwed à l’avance ont l’air d’être coincés entre trois époques. Comme producteur et lyriciste, il est plutôt passionnant et assez proche de la bande Odd Future (nappes Princiennes grasses et instables, samples de films pornos, nihilisme distancié et débonnaire) mais on sent moins chez lui d’envie d’en mettre plein la vue que de faire plaisir à ses 300 followers sur Datpiff.

Bref, le garçon est obscur mais surtout super talentueux. Sa première mixtape parlait plutôt de la Bête, la deuxième parle d’un Elohim tout noir et nous évoque un snuff movie qui serait réalisé par Ridley Scott, époque Blade Runner. Et c’est hyper bien, même si on n’a toujours pas bien réussi à saisir pourquoi.