A un moment un peu malaisé de mon adolescence qui ressemblait sans doute beaucoup au tien, j'ai caressé l'idée de m'éloigner un moment de mes premières passions (la musique et les filles du premier rang en cours de Français) pour me consacrer à fond à un jeu de rôles qui s'appellait Cyberpunk 2020, évidemment inspiré par le Neuromancien de William Gibson (à l'époque, je n'en savais rien).
Pourquoi celui-là plutôt que Star Wars ou Jeu de rôle des Terres du Milieu? Parce que je refusais déjà absolument de me voir en geek abandonné par le destin, parce que mon pote I. était déjà versé dans l'art de maître de jeu et que son grand frère L. avait déjà écrit ses propres extensions, et parce que le dessin sur la couverture était suffisamment sexy et badass pour que j'arrive à entrevoir un lien avec les autres trucs cools de mon existence (le dernier Fishbone, Best, les Critters, les clips de The KLF).
Heureusement pour moi, ma mélomanie et mon amour propre, la tentative de reconversion n'a pas duré 2 mois mais j'ai gardé dans un coin de la tête l'année 2020 comme une date butoir pour le futur à peu près aussi importante que 2019 (l'année où se passent Akira et Blade Runner) et je ne peux m'empêcher, à chaque fois que j'entends la date des prochaines Présidentielles, de me dire que trois années ne suffiront pas pour qu'advienne un monde principalement rempli de hackers bodybuildés à crête iroquoise colorée qui dépensent leur salaire de misère en extensions corporelles cybernétiques et mises à jour pour l'OS qui gère l'IA de leur oeilleton de vue nocturne.
Nicolas Esterle alias Ripit présente LVNARxTORXION, sa 289278743ème oeuvre de noise pulsé au modulaire depuis qu'il a arrêté de jouer du black metal, comme "la bande originale d'un meurtre sacrificiel, la manifestation d'un sabbat de naissance et de mort simultanées" mais vous n'aurez sans doute pas de difficultés à y projeter les mêmes images d'une sombre Sodome mégalopolesque livrée à une incessante guerre de gangs de cyborg fringués comme les mecs sur la jaquette de la VHS espagnole des Warriors de Walter Hill que moi.
Dans le clip très Shining cheap de "Corroborative Misleaded Ambixions" qu'on découvre ci-dessous, aussi, on se balade dans les couloirs anonymes d'un hôtel / d'un hospice / d'un gros bateau sur le point de couler plutôt qu'à la lisière de la Sodome retrofuturiste sus-citée mais je mettrai le choix des images sur le compte d'un malheureux manque de budget. Surtout, je refuse de me laisser dévier de ma première impression : les films qu'on se fait en écoutant un morceau de musique sont toujours plus beaux et plus puissants que ceux qu'on nous impose sur YouTube.
Voilà. LVNARxTORXION est disponible depuis mi-octobre sur TTT (Third Type Tapes, à ne pas confondre avec The Trilogy Tapes) et si vous êtes consommateurs de musique conçue pour détruire l'amour et propriétaire d'une platine cassette digne de ce nom, vous savez sans doute déjà ce qu'il vous reste à faire.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.