Première écoute, premières sensations: Reveille est un énième groupe d'indie rock bête à manger du foin. Deuxième écoute, deuxième et troisième sensations: Reveille est un groupe d'indie rock bête à manger du foin sacrément convaincant. Troisième écoute, quatrième, cinquième, sixième sensations: Reveille a l'air d'être un groupe d'indie rock bête à manger du foin mais il se passe quand même tout un tas de trucs bizarres et plutôt inouïes dans leurs chansons. D'indie rock. Bête à manger du foin.
Tout ça, c'est la faute à François Virot: arrivé dans le coeur des amateurs de post-indie-noisy éduqué axe Deerhoof/Lightning Bolt/Kill Rock Stars à travers le monde grâce à ses disques solo et la spazz math poppy fluo de son groupe Clara Clara, le surdoué lyonnais prétend avoir commencé Reveille parce qu'il était en quête de simplicité. Fondé avec sa moitié batteuse-chanteuse Lisa Duroux, le duo affiche donc une certaine idée de l'indie rock US frontal à son âge d'or (1992 - 1998, ça vous va?) comme on revendique une doctrine politique. C'est ce que chope le cerveau en premier.
Classés "Fugazi du bled" par notre confrère Lelo Jimmy Batista (texte intégral à lire dans ses Oeuvres complètes à paraître en septembre 2027), Lisa et François jouent donc une musique qui a pas mal à voir avec pas mal de groupes des catalogue Dischord et Touch & Go, pas mal à voir avec Blonde Redhead, pas mal à voir avec les Pixies, même. Et s'il existe un emblème de la simplicité indie US, c'est bien les Pixies.
Mais un peu comme pour ces vilaines images en en anamorphose, le cerveau est un peu blousé: derrière ces riffs à la croches et ces unissons de voix ripolinés, il y a un coffre fort rempli à ras bord de petites formes bizarres, d'imbrications harmoniques inattendues, de sentiments complexes pour les épouser.
Pour nous mettre le pied à l'étrier de cette complexité et, un peu, justifier leur existence en ce beau jour de juin 2013, Reveille passent donc un moment par le meta ("We Came Alive" est comme un commentaire de commentaire de mise en abyme de note de bas de page d'une critique du groupe qui attendrait d'être écrite - en gros). Mais ce qu'on retient le plus fort, même après avoir passé la dizième écoute, c'est l'étonnante plénitude qui se dégage de cette pénible contradiction. A l'inverse des grandes arnaques indie arty de l'époque, Reveille ne font pas de la complexité un gimmick: ils l'enfouissent sous les conneries pour dodeliner de la tête dans une cave, et vous la proposent à faire macérer à l'arrière du crâne pour entendre en vrai les (très belles) choses qu'ils ont à vous dire. Une fois n'est pas coutume, "Broken Machines" se dévoile donc avec du temps et un peu d'obstination. Quelqu'un est contre?
On va les voir dimanche 23 au Point Ephémère, en première partie de Marnie Stern (nous on y sera).
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