Certains de nos lecteurs les plus assidus se demanderont ce que The Drone vient faire à s’aventurer sur des terres aussi lointaines de son indie natale, je leur répondrais que 2011 aura à peu près été pour le rock à guitares ce qu’elle a été pour le FC Girondins de Bordeaux, disons une mauvaise passe. Notre intérêt pour les sacro-saintes formations à quatre se dissipent à mesure que pleuvent les bons points sur Pitchfork, les sorties chillwave, et les commentaires sur notre shitlist, nous poussant à chercher les belles histoires hors de nos frontières traditionnelles, et à clore l’année en techno.
L’invité du jour s’appelle Peter Van Hoesen, auteur l’année dernière du très sombre Entropic City. Originaire d’Anvers, Peter a passé la majeure partie de sa vie à Bruxelles, épicentre dès la fin des 80′s d’un genre qui a fait parler de lui jusque sur les plateaux de Dechavanne de Ciel Mon Mardi en 89 : la New Beat (on vous conseille l’archive si vous ne l’avez jamais vue, elle vaut son pesant de cachetons).
Dès son arrivée en France, cette acid house locale nourrit allègrement les premiers sujets télé sur l’ecstasy, mais reste principalement confinée dans la capitale et les grandes villes belges. Du Club Prestige à Anvers, au Boccaccio à Gand, les clubs n’ont plus d’yeux que pour des groupes comme B.S.R. avec leur “Qui”, Amnesia avec des titres comme “Ibiza”, Confetti’s, ou encore Erotic Dissidents avec leur “Move Your Ass and Feel the Beat“, et bercent, avant de virer au cirque FM, le petit Peter qui y découvre les joies de la musique électronique.
Viscéralement attiré par la basse (qu’il joue ado dans un groupe), mais surtout par les synthés depuis une épiphanie à 11 ans devant le set de Telex lors de la 24ième édition de l’Eurovision en 1980, Peter perd pourtant la foi à la fin des 90′s. Alors que son pays est officiellement devenu the european capital of techno grâce à des écuries comme R&S records, il trouve que le genre tourne en rond sur les platines de ses disquaires favoris, et décide alors de commencer à écrire sa propre histoire.
D’abord en co-fondant le label / collectif expérimental d’artistes / “activistes urbains”, Foton (néologisme tiré du concept d’Einstein Photon, sur ces particules ne possédant quasiment pas de masse qui composent les ondes électromagnétiques…), et les soirées qui vont avec.
Tenues en plein milieu de la semaine, elles sont le théâtre d’un joyeux mélange de science du dancefloor oldschool, d’écoutes allongés de musique compliquée, et de productions multi-média. Elles sont aussi le baptême de la Belgique pour une kyrielle de dubsteppers naissant comme Kode9 ou Spaceape. Dès le milieu des années 2000, Peter Van Hoesen y déconstruit surtout petit à petit son héritage électronique, et se forge aux côtés des artistes multi-cartes de son collectif (ingénieurs robotiques, illustrateurs, artistes vidéo) un son dur et radical, imprégné des warehouses de son adolescence. D’abord sous le pseudo de Object, grâce auquel Peter explore les variations de fréquences, puis sous son propre nom avec une ligne de conduite empreinte de ses premiers amours techno, comme résumée sur la home de son label actuel Time To Express: ”Evoquer ce sentiment lorsqu’à 6 du matin, après un marathon de basses, ta poitrine cogne comme elle peut, de la sueur salée coule dans tes yeux, et tu en redemandes encore”.
De ces années d’activisme, Peter en a sorti une douzaine de maxis (Increments, Casual Care, Trusted…), et un album en 2010 donc, “Entropic City”, faisant état après 10 ans de vie bruxelloise, des changements de nos conditions de vie dans les grandes villes, de la tendance à la surpopulation (je vous laisse la joie de découvrir la définition de l’entropie). Une raison pour laquelle Peter Van Hoesen a d’ailleurs quitté sa Belgique natale pour Berlin, allongeant la liste des artistes-expat en terre teutonne. Attiré presque malgré lui vers un plus grand espace urbain, d’autres familles comme celle du Berghain, ont comme lui compris depuis longtemps l’importance de leur scène locale, grâce à laquelle comme le résume Peter, s’opère une “Self-fulfilling Prophecy“, un cercle vertueux de la musique.
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