On vous a déjà expliqué, en long en large et en travers, ici et ailleurs, pourquoi on pensait que le principe du disque de reformation était une idée en général totalement flinguée et qu'elle nourrissait aujourd'hui, non plus seulement une rétromanie régressive et débilitante (ça c'est maintenant l'affaire de tout le monde), mais était surtout synonyme d'impasse émotionnelle et d'amertume. Plus que tout autre, l'affaire s'est encore un peu plus corsée ces derniers temps pour les désormais vétérans du shoegaze, genre éminemment adolescent qu'il est visiblement de bon ton pour ses représentants de venir dézinguer en le réinvestissant 20 ans après, lorsque les bides à bière ont remplacé les fougues d'antan.
Mais alors que Ride met de l'autotune sur son nouvel album et que les parrains The Jesus and Mary Chain se ridiculisent en jouant les rockeurs cinquantenaires comme si de rien n'était, Slowdive vient un peu mettre l'argument du dessus cul par dessus tête en sortant un album non seulement loin d'être honteux, mais même en grande partie réellement enthousiasmant.
Il faut dire que Slowdive a toujours été un groupe compliqué : arrivé trop tard au milieu des années 90 sur le circuit shoegaze et reparti dans la foulée bien trop tôt, le groupe anglais a peut-être pâti de la candeur de ses compositions d'adolescents. Ironiquement, c'est cette même candeur qui les sert plus de 20 ans après, sur un album éponyme qui va sortir le 5 mai sur Dead Oceans, qu'on a écouté et sur lequel on est surpris de retrouver, presque intacte, comme si elle n'était en fait jamais partie, la même grâce juvénile et cristalline qui caractérise depuis toujours leurs compositions.
Alors certes, le plaisir ne fonctionne pas sur toute la durée du disque. Environ une moitié d'album à vrai dire, pile ce qu'il faut pour que "Sugar For The Pill", le nouveau single dévoilé hier et en écoute ci-dessous, déboule. On se demande d'ailleurs pourquoi le groupe a choisi de le mettre en avant, tant il ne fait pas honneur aux sommets de l'album. Mais la musique de Slowdive a toujours été comme ça : jamais tout à fait dedans, toujours élusive, échappant au bruit ambiant et aux affres du temps ; préservant miraculeusement sa beauté fragile dans le creux de la main, toujours sur le point de nous glisser entre les doigts.
À noter que Slowdive jouera à Paris le dimanche 2 avril au Trabendo en compagnie des Français de Dead Sea.
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