Todd Terje "Leisure Suit Preben (I:Cube Remix)" (Olsen)

C'est triste, c'est lent, c'est brûlant, c'est un remix inespéré, inespérément premier degré et puissant du "Leisure Suit Preben" de Todd Terje par le grand Nicolas Chaix. C'est aussi la preuve que le grand bain de nostalgie pro 70's dans lequel nous baignons tous inexorablement est loin d'être uniforme. Les années 70 fantasmées par Terje Olsen étaient pleines de terroristes métisses sexy aux Kalashnikov bien huilées et de clones d'Ursula Andress qui se prélassent en bikini, celles d'I:Cube sont plutôt remplies d'espaces virtuels en 3D filaire, de robots dépressifs et de courses poursuite dans des cités de cristal dévastées. Et le plus chouette c'est qu'on est même pas obligés de choisir son camp.

Tallmen 785 "Down (Fiedel Remix)" (Fiedeltwo)

Un peu de funk, un peu de senf, un peu de maydaaaaay: c'est Fiedel aux manettes et c'est la house teutonne dans toute sa splendeur et tout son pathétique, du genre qui s'écoute surtout dans les coffee shops de Cologne l'après-midi mais dont on sait qu'elle ferait un tabac dans les Schlager Parties du Brandebourg. Tube mongolo-génial de la quinzaine, haut la main.

In Aeternam Vale "Valium Water" (In The Dark Again)

A mi-chemin de l'utilitaire et du mystique, cette énième pépite du revenant In Aeternam Vale (on clique ici pour se rafraîchir les idées) fait son pont entre la techno trancey autoroute et la grande drone music séculaire mais méchamment mystique des 70's. Autant vous dire qu'il y a de quoi se perdre et se retrouver 100 fois dans ces 16 minutes majestueuses et forcément ascensionnelles, qui commencent au fond d'un caniveau lyonnais pour finir quelque part entre Saturne et Jupiter. 

Rezzett "Goodness" (The Trilogy Tapes)

Ça fait des mois que ce morceau zone sur Youtube, ça fait des mois qu'on admire ses magnifiques nappes metalheadziennes dans un RIP abominable de Rinse FM et ça fait des mois qu'on attend qu'il commence à nous saouler. Mais non, ça n'arrive pas. C'est comme Stalker de Tarkovski ou Coup de coeur de Coppola, à chaque fois qu'on se le repasse on y décèle des nouvelles couleurs, des nouvelles crevasses, des nouvelles raisons de se le repasser encore une fois. Autant vous dire que son arrive à mettre la main sur le maxi, on va l'user jusqu'à l'os.

Keita Sano "La Guajira" (Discos Capablanca)

Retour en biais d'un des plus curieux newcomers de l'underground house japonais (on vous en parlait en mai dernier) avec ce 4 titres totalement schizo dont la moitié des morceaux ressemble au Soleil et l'autre à un amas de viscères de mammifère marin en train de sécher sur une plage barbouillée de mazout et de matières fécales diverses et variées. Celui qu'on a choisi de vous faire écouter fait évidemment partie de la deuxième catégorie. On est sur The Drone, faut pas déconner.

Gary Gritness "The Filth Dome" (Clone Crown)

Le jour, le Français Tim Becherand est ingé son et bassiste virtuose. Il joue pour les Masters at Work, Terry Hunter ou Grant Nelson. Dans son studio couvert de moquette épaisse et rempli de machines tapies de loupiottes qui clignotent, il envoie des beats "qui claquent", des basses "bien rondes" et des volutes de rhodes "bien smooth" qui donnent envie d'avoir des relations hétérosexuelles avec des "bombes" aux moeurs légères et aux courbes généreuses. Le soir, il descend dans sa cave, deux étages plus bas, où il a installé un deuxième studio de fortune avec quelques boîtes à rythmes défectueuses, un tapis humide et des mouchoirs maculés de sperme et de sang (ne me demandez pas ce qu'il en fait ni d'où ils viennent, les mouchoirs, c'est pour l'image). Et là, entre les gouttes d'eau sale qui tombent du plafond et les idées noires, il enregistre à la chaîne des tracks d'electro cyber super poisseuse dont il cache l'existence à tout le monde, à la créature de rêve à qui il est marié, à sa mère, à ses clients. C'est toujours mieux que de descendre dans les ruelles derrière Marcadet-Poissonniers pour égorger des crackheads inconscientes et des femmes-enfants obligées de se prostituer.

Vakula - "Maskulls Keyhole" (Leleka)

A Voyage To Arcturus, dernier album de Vakula (vous savez, l'Ukrainien qui fait de la house un peu pétée) semble avoir été élaboré à l'aide d'une bonne dose de mauvais goût, et c'est justement ce qui le rend fascinant. A cheval entre jazz fusion 70's intello-crétin, world music que l'on entend chez Nature & Découvertes et house lounge (désolé pour le gros mot) de Buddha Bar, "Maskulls Keyhole" pourrait être joué dans un club de la Planète Sauvage. Et nous ça nous dit bien d'essayer le dancefloor des Oms.

Hajj - "Dat Cold Winta" (Brothers From Different Mothers)

Hajj, c'est le nouveau blase de Florent Hadjinazarian, connu aussi sous le doux sobriquet de Weirdd. En plus de faire des clips pour son propre label (Dawn Records) et pour ses petits copains, Hajj fait aussi de l'ambient techno "cracked" (selon les infos de son soundcloud). Et quand on tape "cracked" dans Google Translate, on obtient "craquelé", "fissuré" et "timbré". Pourtant, à l'écoute de "Dat Cold Winta", on aurait plutôt tendance à penser que le bougre compose sous crack, avec une préférence pour l'injection par picouse (la pipe, c'est pour les petits joueurs). Ca se trouve dans la compile cassette bien maléfique Ambient Party Turns Into Orgy à sortir chez les lyonnais de Brothers From Different Mothers.