Ekman "Gizmo Made Me Do It" (Berceuse Heroïque)

Pour ceux qui l'ignoreraient, Ekman a sorti l'année dernière sur The Trilogy Tapes un disque formidable: le bien nommé Entropy, dont le morceau titre nous reste en tête comme le morceau de techno le plus droit et le plus poignant depuis le "Radiance" de Surgeon (si ce dernier morceau ne vous dit rien et si vous n'avez pas peur des sentences un peu latines, remplacez par le segment "le morceau de techno le plus droit et le plus poignant depuis 5 ans"). Alors forcément, on n'écoute plus sa musique de la même manière (= comme le tout venant techno caniveau de L.I.E.S. & co.). Heureusement pour sa cote dans nos coeurs, ce nouveau maxi pour Berceuse Heroïque n'a rien de trivial. Mieux, il passe toutes nos expectatives à la friteuse. Entre saccage de trance et indus techno top niveau, c'est du très lourd et du très douteux, de la dance de fête foraine ou de fin du monde qui tombe à pic pour célébrer la fin d'une semaine proprement infernale. 

Paula Temple "Gegen" (Noise Manifesto)

Dans la press release qui accompagne cette sortie, Paula Temple présente "Gegen" comme son "arme secrète". Bouclé il y a des années, elle s'en réservait la primeur pour ses DJ sets et on la comprend: tout de la qualité du kick à la perniciosité du riff de synthé pue le peaktime.  

Ben Sims "Neurosis (Surgeon Remix)" (Theory Recordings)

Si la techno anglaise se porte si bien, c'est que ses artisans savent très bien ce qu'ils veulent et lui sont très dévoués. Ici deux générations croisent le fer et si on est bien en peine de déterminer ce que cette techno a à voir avec 2015 (épaisseur des graves exceptée, le truc aurait pu sortir en 1993), on est une énième fois éhabis par la puissance du son et la précision du geste. "C'est de la techno anglaise, quoi".

An-i "Rut" (Cititrax)

Sorti dans les derniers jours de 2014, ce terrible Rut permet d'identifier le chemin parcouru par le new-yorkais An-i depuis son premier Kino-i sorti au tout début de l'année: un truc en forme d'ascension éclair. Quelque part entre l'EBM super funky des tout premiers Front 242 et les Massacres dans le train fantôme de Tobe Hooper (comment ça tu l'as pas vu?), "Rut" ferait sans doute un générique idéal à un reboot des Contes de la Crypte 2.0., showrunné par Eli Roth et produit par HBO. 




Soulphiction "Obsidian Fields" (Philpot)

Discuter de l'intérêt de la deep house allemande revient un peu à discuter de l'intérêt du Schnitzel, cette espèce géante d'escalope panée qui se déguste dans les biergarten de Bavière et les kaffehaus viennois. Pour les uns, c'est juste une escalope panée. Pour les autres, c'est la délicatesse ultime d'Europe orientale. Tout l'intérêt dans cette belle assiette funky bien garnie mitonnée par le vétéran Soulphiction est dans la variation étrange qui débarque à mi-chemin, équivalent musical très réaliste de la confiture d'airelles qui accompagne les schnitzel géants dans la vallée du Salzkammergut, au-dessus de Salzbourg. En d'autres termes, c'est plus délicat que ça en a l'air.

Jovonn "Flutes (165th Street Mix)" (Clone Classic Cuts)

Qui a dit que la meilleure espèce de house était l'espèce la plus clivante, déjà? Une chose est sûre, la première anthologie de Jovonn ravira autant les fans (dont DJ Deep, qui fut le premier à se passionner pour son oeuvre au milieu des années 90) qu'elle fera frémir les frileux qui ont mal aux dents quand on leur passe de la house du New-Jersey. En pole position de l'indispensable Goldtones plus spécifiquement, il y a cette flute tune à base de flute MIDI pitchbendée plus que de raison qui rejoint illico le firmament de nos morceaux préférés à base de samples de flûte et de flute MIDI pitchbendée. 

Kowton "Glock and Roll" (Whities)

Et là on se demande s'il existe un sous-genre de la house music qui favoriserait l'usage du glockenspiel au point de s'appeler "glockenspiel house", on tape "glockenspiel house music" dans Google et on constate qu'il existe bel et bien, et qu'on trouve même sur Youtube plusieurs fichiers intitulés "Glockenspiel House Mix". La semaine prochaine on tente quoi? "Coffee techno"? "Bretzel house"? (On attend vos suggestions).

JoeFarr "FTone (Truss Edit)" (No Label)

Toute la saleté d'Internet (cf. ci-dessus) résumée en un kick qui bastonne et une petite nappe malsaine qui fait entendre ses clapotis comme des flaques d'eau de pluie boueuse, c'est possible, la preuve. 

Sueño Latino "Sueño Latino"  (Illusion First Mix) (Dance Floor Corporation)

Que ce soit bien clair entre vous et moi:  toutes les opportunités de se procurer un exemplaire physique de "Sueño Latino" sont bonnes à prendre. Présentement réédité avec tous ses mixes et remixes les plus célèbres (dont l'Illusion First Mix de Derrick May et Carl Craig qui ouvre l'Eden de Mia Hansen-Løve) et des crédits clearés (pour rappel, l'original doit 50% de sa magie au désormais fameux E2-E4 de Manuel Goettsching d'Ash Ra Tempel), ce hit historique et séminal de la balearic fera en outre un cadeau idéal pour la Saint Valentin (on prend les devants). Si vous voyez ce que je veux dire.

Markus Suckut "Turn On" (Mosaic)

Le fameux tryptique déclamé par le Dr Timothy Leary "Turn on, Tune in, Drop Out" divisé en 3 morceaux, sur ce "Three Trips" bati à la gloire des substances hallucinogènes. A tous ceux qui estimeraient encore que la Techno est une musique de gros défoncés, et bien vous savez quoi? Vous n'avez pas tout à fait et tort et tant mieux.

Floating Points "Nuits Sonores" (EgloRecords)

Le hit des sols de danse de cette fin d'année 2014 cligne de l'oeil au plus éminent des festivals Lyonnais. On pourra toujours faire la fine bouche en regrettant le côté "Dance à Papa" de la chose mais ces temps-ci nous ne sommes qu'amour.