Qu'il est beau ce moment dans la vie d'un label, où tout ce qu'il sort semble être touché par la grâce. On ne sait pas trop comment le phénomène survient, quelle part d'énergie créative circule effectivement entre les artistes et jusqu'à quel point la vision qu'on s'en fait tient au joli lieu commun de la Scène comme cerveau collectif, mais le fait est que certaines compilations de labels, parfois, ressemblent effectivement plus à des vrais albums que certains albums d'artistes. Des exemples? Hier, la première Headz de Mo'Wax, la première Platinum Breakz de Metalheadz ou les deux volumes d'Artificial Intelligence de Warp ; plus près de nous, les Superlongevity de Perlon, la 116 & Rising de Hessle Audio ou l'album (en sus vendu comme tel) de Sandwell District.
Dans le cas du collectif bristolien Livity Sound - "collectif" est le mot qu'on utilise quand on croit dur comme fer au lieu commun évoqué ci-dessus - il y a effectivement quelque chose d'une circulation de formes et de fluides, voire d'une dissolution des égos dans la machine. Tous citoyens fierots de la même citadelle provinciale (Bristol, deuxième cité du dubstep après le South London), éduqués autour des mêmes sound-systems, Peverelist, Kowton et Asusu se sont rassemblés au moment précis où la scène dubstep locale achevait de se désintégrer:
"Alors que la partie mainstream du dubstep évoluait en rave-music commerciale et brisait le lien avec ses origines en sound system, Tom Ford (Peverelist) a commencé à activement explorer des nouveaux territoires, expérimentant avec des tempos plus lents tout en tachant de garder intacte l'essence de son approche. Livity Sound a émergé du désir de définir cette musique inédite comme une entité à part, indépendante: un mélange brut et exploratoire de techno anglaise, implanté dans les méthodes dub et la culture sound system".
Tout est dans le "Sound" de "Livity Sound", donc. Plus encore que Punch Drunk (label fondé par Peverelist en pleine explosion dubstep), Livity Sound s'avance moins comme un label que comme un organisme à plusieurs têtes, explorant les patterns et les idées tordues dans une joyeuse confusion de gestes et d'identités. Sans suivre aucun schéma précis, la musique qu'on entend sur les 7 références du label et la compilation récapitulative qui sort ces jours en CD se repaît du même malaise formel (impossible de déterminer s'il s'agit de breakbeat ou de techno), de la même sécheresse, du même dénuement. Profitez-en vite, ça a la facheuse tendance à ne durer qu'un temps, les états de grâce.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.