King Britt est ce genre de mecs dont le CV force le respect et l'admiration jusqu'à en attraper le vertige. Co-boss jusqu'en 2001 du label Ovum, King Britt (c'est son vrai nom) a travaillé avec un bon nombre de poids lourds de la house, du hip hop, de la néo-soul, bref, de la musique noire contemporaine. Depuis 2009, le monsieur est aussi à la tête d'un groupe/label du nom de Saturn Never Sleeps, un projet arty en hommage à Sun Ra, légende du jazz libre notamment connu parce qu'il croyait que ses ancêtres venaient de Saturne et qu'il prônait un retour aux racines interstellaires de l'humanité. D'accord...
Il n'empêche que, des délires cosmico-païens du génial fondateur de l'Arkestra découlèrent une palanquée d'accointances entre musique afro-américaine et science-fiction: de Miles Davis à George Clinton en passant par Lee Scratch Perry, et surtout par le techno de Detroit, dont  les précurseurs ont fait de leur fascination pour les technologies avancées et le futur leur  source première d'inspiration. En 1993, le journaliste américain Mark Derry parle pour la première fois d'afro-futurisme. Dans son article Black to the future, il dresse un parallèle entre le maronnier conspirationniste qu'est l'enlèvement d'humains par des extra-terrestres et le déracinement du peuple noir par les négriers occidentaux. Une thèse qui a trouvé un écho considérable parmi pas mal de musiciens noirs américains. Un des exemples les plus emblématiques est celui de Drexciya, collectif à géométrie variable concentré autour de James Stinson qui a inventé tout un monde aquatique peuplé par les Drexciyans: des fantômes revanchards des cadavres d'esclaves jetés à l'eau pendant la période macabre du commerce triangulaire.

Bref, tout cela est bien fascinant, et si vous ressentez l'envie de devenir hyper calés en liens entre musique noire et science-fiction, on vous conseille la lecture de l'ouvrage More brilliant than a sun du musicologue anglo-ghanéen Kodwo Eshun.