Voilà un petit disque qui tombe à pic. Depuis plusieurs semaines en effet, nous sommes plusieurs chez The Drone à nous trouver assaillis de pulsions dures à réprimer de déclarer à la face du monde notre amour pour l'album de Todd Terje (It's Album Time, sortie prévue le 8 avril à la FNAC la plus proche de chez vous); ce qui nous retient de le faire, c'est le fâcheux fait que cet indéniable événement discographique survient à une échelle qui dépasse largement notre champs d'activité: évidemment, Todd Terje n'a plus franchement besoin de The Drone pour arriver dans les foyers.
Pour se consoler, on jette donc notre dévolu sur les Joe Davolaz, collectif de loustics basé dans la patrie d'à côté de celle du Terje et qui partage avec le Norvégien moroderien un amour certain pour les musiques utilitaires, de la novelty à la surf music en passant par l'exotica ou la bossa nova. Formés comme backing-band de Musette, projet du retro-sound-designer surdoué Joel Darnell (et co-auteur de cet excellent Dronecast pour son label Tona Serenad), les Joe Davolaz sont même à la limite du groupe pastiche. Dans les démos intégralement produites à l'ancienne (magnétos à bande qui soufflent, guitares qui crachent, Mini Moogs qui grincent) qu'ils trimballent dans leurs valises en skaï vintage, il y a le "Caravan" de Duke Ellington, "Besame Mucho" ou le thème d'Un homme et une femme.
Mais de la même manière que l'album de Todd Terje est bien plus qu'une pochade space age disco, ce flexidisc formidable est bien plus qu'une parodie de connerie space age pop. Parce que l'exercice est mené avec une nonchalance et une gentillesse qui désarmeraient jusqu'au plus radical des modernistes d'abord; parce qu'à ce niveau là de recréation, ensuite, on frise le paradoxe spatio temporel. Ou pour citer ce bon vieux Guy, le vrai est un moment du faux, et inversement.
En d'autres termes, notre époque est tellement profondément engluée dans ses paradoxes et ses complexes par rapport à son passé qu'on vous met au défi de déterminer qui, des revisiteurs critiques des artefacts d'antan ou des inventeurs naïfs de formes supposément nouvelles, sont les progressistes ou les réactionnaires de notre temps. Plutôt que de vous taillader les veines en écoutant un Boulez, on préconise donc de commander dès maintenant ce vrai-faux-vieux flexidisc livré entre deux vraies fausses vieilles cartes postales jaunies sur le vrai site Internet de Tona Serenad.
Info subsidiaire: au cas où vous vous poseriez la question, oui, les Joe Davolaz empruntent effectivement leur blaze à Crazy Joe Davola, le mirifique personnage de psychopathe de Seinfeld.
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