Ça fait des mois qu'on l'attend, celui-là, mais on ne vous en voudra pas de sortir le carton "nerd": un docu long et dense sur les synthétiseurs modulaires, ces monstrueux machins plein de knobs, d'orifices et de câbles multicolores qui recouvraient les murs des savants fous de la musique électronique avant que le miracle de la technologie ne les transforme en mini-pianos en plastique dans les clips de Partenaire Particulier. Il n'aura échappé à aucun lecteur de The Drone qu'ils font leur retour en force dans les studios depuis, en gros, que les laptops ont fini de perdre leur aura occulte, et ce autant comme accessoire de déco nouveau-riche (coucou Deadmau5, coucou Billy Corgan) que comme vraie machine à faire muter la musique. Ça méritait donc bien un petit documentaire.

Toujours en chantier, le film de Robert Fantinatto promet autant l'arc rétrospectif avec les pionniers (Alan Robert Pearlman, fondateur de la firme Arp, Don Buchla, Robert Moog, Morton Subtonick) que le trombinoscope de synth makers contemporains (les gens de Synthesizers.com, Analog Lab, Eurorack, Doepfer...) mais ambitionne surtout beaucoup plus que l'overview technique pour nerds du serail. A l'instar des bons vieux docus pédagogiques de la BBC (Synth Britannia, pour ne citer que celui-là), il enfile les entretiens avec les djeuns qui perpétuent la tradition: Gavin Russom (actuel The Crystal Ark et réparateur de synthés officiel de DFA), Sean McBride (Martial Canterel), Jason Amm (Solvent) et toute une floppée de filles et de garçons qui trouvent qu'une rangée infinie de racks et de modules est "sexy". Avouez que c'est trop mignon.  

En avant-goût idéal, les producteurs du film et le site Matrixsynth lâchent depuis quelques temps les versions extended des entretiens qui feront le film et ça ne vaut pas le coup que pour les bascules de point sur des jacks dans les trous. La preuve qu'on est à des milles du docu matos relou: même quand ils livrent leurs petites préférences pour telle ou telle marque de bouzin, Carl Craig, Chris Carter ou Richard Devine parlent surtout inspiration, magie, invocation des forces occultes de la création. A ne surtout pas faire regarder, donc, à un fan de Gnawa Diffusion.