Allez, la fin de l'année est au coin de la ruelle, les tops sont publiés, dans moins de 3 jours je serai dans un recoin du Monde où le débit Internet ne peut physiquement pas dépasser les 50 Kbit/s, je peux donc tout vous dire: je connais Ricky Hollywood, Stéphane Bellity de son vrai nom, personnellement.
Quand je le croise quelque part, par exemple à un concert, je lui fais la bise, je lui demande "comment ça va" et je m'intéresse vraiment à ce qu'il peut me raconter, même si la conversation dure plus longtemps qu'une gorgée de Stella. Il nous est arrivés de voyager en voiture ensemble, de partager des plateaux repas, de faire la queue dans des kebabs en province à 4h du matin et de regarder Un dîner presque parfait dans des chambres de Formule 1 en faisant semblant de rigoler très fort. Dans le cadre du travail, il nous est aussi arrivés de nous crier dessus, pas très violemment, mais suffisamment pour se faire un peu peur l'un à l'autre. Et quand il chante dans "Joanie" ou "Poster Moderne" ses histoires méchamment rohmeriennes de Canadiennes rencontrées dans des bars qui ne rappellent pas ou de groupes de synth pop qui donnent tout dans des caves du onzième arrondissement, je connais plus ou moins les histoires vraies qui se cachent derrière.
Autant vous dire donc que j'ai un rapport plutôt biaisé aux chansons de Mes meilleurs succès d'estime, 2002 - 2010, première anthologie de ses plus plus beaux inédits, hits de concert et autres plus grands succès jamais sortis à sortir en cassette/digital chez Clapping Music et Gonzaï Records, et à l'autobiographie semi-fictionnelle qui s'y dessine en creux.
Mais si je vous en parle aujourd'hui en mon nom propre et en qualité d'ami de Stéphane Bellity, c'est que je suis aussi persuadé qu'à l'instar des grandes oeuvres d'autofiction et autres autobiographies romancées, la portée de ces tubes de poches légèrement impudiques sur les bords mais formidablement écrits et dessinés est, si ce n'est universelle, au minimum nationale. Voyons voir ce que Ricky lui-même à à nous en dire, parce que c'est très parlant et, à mon humble avis biaisé, donc, très amusant:
"Le premier morceau sous le nom de Ricky Hollywood est né d’une offrande à une fille énigmatique du New Brunswick, Joanie, en 2002. J'avais décidé de tomber éperdument amoureux d'elle et de la séduire par mon art. En vain. S'en est suivi une grande période de détresse constructive durant laquelle j'ai constitué la première partie du répertoire, dît la période plaintive, de Ricky Hollywood, avec des titres comme "My empty Fridge", "Joanie", "Heros-super", "Hollywood" ou le bien nommé "Je me sens mou". N'étant ni guitariste ni pianiste, mon seul outil fut le PC Pentium III qu'un type m'avait donné pour me remercier de lui avoir rendu un menu service (charger son tel avec mon chargeur), alors que je pleurais Joanie dans la rue. Sans le savoir, cet ordi m'a permis de composer horizontalement, c'est à dire, sans trop savoir où un morceau doit aller, et je crois qu’à ce jour je n'ai toujours pas changé de technique.
Cet ordinateur est vraiment l'élément central dans cette histoire, il est à la fois l'outil, l'aboutissement et même parfois le thème de mes chansons, de "Chambre de musique" qui ouvre cette compilation à Parti dans le passé sur « Renaturation EP » sorti chez Dokidoki en 2013. Après ma dépression sentimentale, suivit alors la période dite de Myspace, cette super plateforme censée me permettre de passer au stade de la séduction world wide. Non seulement Joanie avait aussi crée un compte – et j'espérais qu'elle écouterait en secret mes œuvres – mais surtout je réalisais que je pouvais atteindre mes semblables avec des chansons plus conquérantes parmi lesquelles "Tu me voudras", "My masterpieces", "Tu adores cette chanson" ou encore "Je t'éclate la gueule". On était en pleine utopie du freeshare. Réalisant dès cette époque, clairvoyant que j'étais, que le support matériel était devenu has been et que le business était mort (mince), je décidais d’abandonner toute ambition discographique en donnant allégrement mes chansons à qui voudrait sur mon site personnel. Alors que je croyais ces musiques dispersées à jamais dans les arcanes de l'anti-matière informatique, Gonzaï et Clapping Music m'ont proposé de les réunir dans cette compilation. Et je les en remercie."
N'en jetons plus: ces meilleurs succès d'estime de Ricky Hollywood pourraient même plaire à votre Maman fan de Katerine, des livres d'Erik Orsenna et de France Inter voire à vous-même, qui n'êtes pourtant pas un grand consommateur de variété chic et de chanson à texte. Car Stéphane Bellity est bien plus qu'un bon ami ou un énième ravaleur de chanson qui s'est mis à la MAO et aux synthés parce qu'il n'a pas les moyens de se payer un orchestre jazz ou qu'il a trop écouté Etienne Daho.
C'est, à l'instar de son cousin Ariel Pink, un remarquable faiseur de pop au troisième degré, dont les influences vont du Mahavishnu Orchestra à R. Steevie Moore en passant par Prefab Sprout ou les Beach Boys. Et si ces inédits de plus ou moins longue date n'atteignent pas tous le niveau de sophistication plastique et d'invention de son remarquable Renaturation EP, on y trouve plus de mélodies précieuses, de bonne mélancolie (car la mélancolie est comme le cholestérol, il y en a de la bonne et de la mauvaise) et d'idées d'arrangements que dans 100% des disques défendus par France Inter cette année. Voilà, c'est dit. Et désolé, Ricky, je sais que ça te tient à coeur de rentrer en rotation lourde à la radio nationale. Mais j'ai suffisamment confiance en toi pour croire que cette méchante saillie finale ne te portera pas préjudice dans ta vénérable mission d'accession à la gloire internationale.
Par ici le Bandcamp, par là la précommande.
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