Lorsqu’on parle d’expérimentations en musique - et c’est parfois le cas chez nous - certaines personnes intellectuellement paresseuses situent l’expérimentation dans la simple volonté de l’artiste à sortir des schémas conventionnels, des structures rythmiques habituelles, sonner bizarre, sonner différent. En gros, les gens classent tout ce qui peut brailler d’une façon un peu chelou dans la musique expérimentale.
Qu’on se le dise une bonne fois pour toute : Expérimenter en musique, ce n’est certainement pas arracher les tympans de l’auditeur sur une fréquence continue de 14 minutes juste parce qu’on s’imagine être le premier à le faire.
Si j’attrape une guitare pour la première fois de ma vie et que je me met à gratter des cordes au hasard je suis, à mon niveau, déjà dans l’expérimentation. Je cherche à jouer un FA mineur mais j’ai besoin d’expérimenter pour y arriver.
Expérimenter en musique, c’est appuyer sur un bouton, voir ce que ça donne, avancer à tâtons dans l’inconnu, et planter son drapeau sur une ile fraichement découverte, si on estime qu’il y fait bon vivre.
Car cet album de Stéphane Laporte à venir chez Antinote le 29 septembre n’a pas besoin d’être livré avec son mode d’emploi pour comprendre qu’il a été construit, justement, sur la base de sessions passées à appuyer sur des boutons, tourner des potards, brancher, débrancher, pousser des tranches jusqu’à ce qu’il en sorte de la musique, agréable à écouter si possible. On imagine bien le gars, en grand guru créateur modulo, debout devant ses jolies machines étalées sur une peau de bête au milieu du salon, prêt à en découdre avec ses ouailles et pensant à voix haute tout en faisant craquer ses doigts : « Voyons ce que vous avez dans le ventre, mes minions. »
Le résultat du domptage s’appellera donc logiquement Fourrure Sounds et il fera certainement écho à des expéditions plus anciennes, menées par les explorateurs sonores de génie que sont Raymond Scott ou Francois de Roubaix. Des volutes électroniques aux mélodies enfantines, parfois pastorales, une aventure spatiale faite de fusées en carton et de planètes souriantes.
Une approche relativement différente de celle que Laporte a pu exercer au sein d’Egyptology (sous le nom de Domotic), plus aérienne, naïve et n’ayons pas peur des mots : profondément « jolie ». Une valeur devenue assez dégueulasse avec le temps et qui ne demande qu’à être réhabilitée au plus vite, si possible en redécouvrant le plaisir de s’amuser comme un gosse avec une flopée de machines posée sur un gros tapis de fourrure. Un plaisir qui se transmet plutôt bien. Et dont on peut s'acheter les droits d'exploitation en LP, via son disquaire préféré, ou en digital, via iTunes.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de nos cookies afin de vous offrir une meilleure utilisation de ce site Internet.