Vous avez tous un pote qui collectionne des vinyles d'electro synthétique est-allemande des années 80. Vous avez tous un pote un peu fétichiste qui voue un culte à Bob Dylan. Vous avez tous un pote qui, chaque année, part faire son trip de backpacker dans les balkans pour prendre des clichés Instagram de statues soviétiques.
A l'instar de cette étrange pandémie culturelle liée par tous les fils à notre temps rétrophile et au regard de la configuration historique un peu particulière de l'Europe de l'Est, vous savez qu'il y a aussi cet ambivalent mouvement de regards tournés vers le passé que les allemands appellent Ostalgie. Foyers de nostalgie pour le plein emploi dans la jungle super-libérale, quincailleries et autres vestiges de l'URSS sur les marchés, succès délirant de Goodbye Lenin et de ses succédanés - l'Europe orientale pense fort à son passé socialiste. Quitte à ce que chacun se fasse ses petits arrangements intimes avec l'Histoire, au forceps ou à l'eau de javel.
En déplaçant la focale encore un peu à l'est, du côté des des Balkans, on s'aperçoit que, là-bas aussi, on parle "Yougonostalgie" et "Titostalgie" : des pièces slovènes estampillées du drapeau rouge à la "mode titiste" - avec ses codes vestimentaires de l'ancien régime - en passant par la résurgence du serbo-croate (langue présumément morte à la chute du régime), la marque Tito est autant devenue une niche politico-culturelle qu'un nouveau marché.
On peut d'ailleurs y repérer des subcultures "yougonostalgiques" apparemment vivaces, tant dans le rock patriotique à la gloire du leader adoré que dans le cinéma. Et dans le prisme politique des pays de l'ancienne république, la "Yougonostalgie" décline un nouveau sentiment national, tourné vers le rayonnement international de Tito et l'image d'un socialisme à "taille humaine", opposé aux partis de droite.
Le documentaire qu'on veut vous présenter ici, Cinema Komunisto : Il était un fois en Yougoslavie, retrace dans cette veine mélancolique l'âge d'or du cinéma yougoslave, et l'histoire d'amour de Tito pour cette vaste entreprise de propagande : le gars a tout de même reçu Hitchcock et Orson Welles dans ses studios de cinéma un poil mégalos Avala Films. Le fim est sorti mercredi en France et sera seulement projeté à l'Espace Saint Michel jusqu'à la fin de la semaine prochaine. Et cela en compagnie de la réalisatrice. Deux trailers juste en-dessous.
(Photo du bas : Tito avec les acteurs Elisabeth Taylor et Richard Burton)
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