Quand Frustration a débarqué sur le roster de Born Bad Records pour inaugurer la toute première sortie du label parisien il y a déjà dix ans, les cartes semblaient rebattues en ce qui concerne la musique de France : une attitude générale démissionnaire, un jusqu'au boutisme qui semblait définitivement avoir déserté les envies de chacun - et ne parlons même de la notion d'indépendance, qui s'apparentait alors plus à un slogan publicitaire qu'à la défense d'une certaine idée de l'inflexibilité et de la rigueur artistiques. Mais ça, c'était justement avant que Born Bad (et toute une tripotée de labels plus enthousiasmants les uns que les autres, qui ont rapidement emboité le pas de la maison) ne décident de sortir des disques au potentiel commercial sinon suicidaire, tout du moins peu enclin à se soucier d'amabilité ou de cirage de pompe envers un public qui de toute façon commençait déjà à se désintéresser du format album.
Le parcours de Frustration est en ce sens un peu à l'image du label : ayant grandi en même temps que la maison de disque parisienne, le groupe s'est durant sa décennie d'existence jusqu'ici peu soucié des effets de mode, de la concurrence, et encore moins de l'idée de plaire au plus grand nombre - ce qui, en définitive, se résume très souvent à personne. Entre son premier album Relax (2008), et ce Empires Of Shame, qui sortira le 14 octobre, le groupe s'est employé à toujours creuser le même sillon, constitué principalement de cold wave puissante et quasi martiale, d'imagerie dystopique et de crachats à la fois retenus et hargneux, le tout entrecoupé par des concerts à de nombreuses reprises triomphaux (on pense notamment à leur passage au festival Villette Sonique en mai dernier en compagnie de leurs faux cousins britons Sleaford Mods, mais aussi à leur prestation dans la prison de Bois d'Arcy avec Cheveu).
Aujourd'hui, ils reviennent avec un nouveau morceau, "Cause You Ran Away", qui paraitra donc sur Empires Of Shame, le nouvel abum du groupe. À l'écoute de la chanson en question, sorte d'étrangeté discoïde et synthétique que n'aurait pas reniée un LCD Soundsystem au cordeau, on se dit que l'on est prêt à suivre les folles embardées du groupe et du label pour encore longtemps, et que la fidélité est peut-être l'un des derniers bastions qui vaillent la peine d'être défendus dans le marasme actuel d'une industrie musicale française qui n'en finit plus d'être moribonde.
Il est à noter que la release party de l'album se fera les 12 & 13 octobre prochains à la Maroquinerie. Toutes les infos sont disponibles ici.
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